Un peu de bon sens !

La végétalie étant un micro État imaginaire, il m'arrive de manger à "l'étranger". Et quand on me propose un plat de viande, ou de gâteau à base d'oeufs et de lait, je me retrouve le plus souvent dans la position explicative.

 

Ces questionnements découlent de motivations variées : une réelle curiosité, un intérêt pour le régime ou l'éthique, ou, la plupart des cas il faut bien l'avouer, un réel dénigrement et une envie puérile de "casser".

 

L'idée m'est venue de faire une petite sélection des questions et remarques, des plus drôles aux plus blessantes, des plus intéressantes aux plus débiles.

 

 

La série des "pourquoi végétarien/végétalien/vegan ?"

 

Dans ce grand pays qu'est la France, où les omnivores courent toujours, c'est la question essentielle.

 

-l'exploitation animale : les êtres animaux sont plus ou moins proches de nous : ils ont leurs propres intérêts à vivre, éprouvent des émotions comme la peur, la joie, la colère. Ce qui nous différencie est notre haut niveau de conscience. C'est précisément ce qui nous rend conscients de la sensibilité et de la souffrance des autres êtres animés. Est-ce moral de les tuer pour les manger, alors que nous pouvons nous-même nous passer de leurs viandes, laits et oeufs ?

 

-on ne tue pas la poule pour son oeuf : et bien si. La "production" de poules pondeuses implique autant de poussins mâles que femelles. Ce qui a pour conséquence le massacre généralisé des poussins mâles. Quant aux poules pondeuses, en fin de rentabilité, elles sont conduites à l'abattoir, et leurs chaires finiront dans l'alimentation. La production d'oeufs est intimement liée à celle de la viande de volaille.

 

-je ne prends plus que du bio pour le bien-être animal : la seule chose qui change, c'est le fait que l'animal dispose d'un peu plus d'espace, et d'une alimentation bio. L'intérêt premier est d'assurer la sécurité alimentaire du consommateur final, et non pas le bien être du consommé. L'animal est tout autant privé de liberté, et sera abattu dans les mêmes conditions que ceux issus de l'élevage industrialisé.

 

-à la campagne, on achète son lait directement à la ferme où la vache est aimée : elle est inséminée contre son gré afin qu'elle "produise" un petit veau. La mise-bas a déclenché la production de lait. A partir de là, on lui retire son petit pour lui prendre le lait spécifiquement destiné au veau. Le petit veau mâle, mal-nourri, finira à l'abattoir et fournira une viande blanche et non rosée.

 

-et les petits producteurs d'oeufs ? C'est un échange de bon procédé, la poule est heureuse, et le propriétaire prend juste ses oeufs : mais pour avoir des poules pondeuses, le petit producteur a participé au commerce de poussins femelles et par conséquent, participe indirectement au massacre des poussins mâles.

 

-et le véganisme, alors ? : si on refuse l'exploitation animale pour notre alimentation, il est logique d'en faire autant pour notre habillement et notre loisir. On boycotte donc le cuir, la fourrure, la laine et la soie, ainsi que la chasse, la  corrida, l'équitation et le cirque mettant en scène des animaux dénaturés. Le principe de base de toute exploitation animale est le même : sélection des individus productif et élimination des non-productifs, exploitation avec privation de liberté, réforme, c'est à dire abattage, de l'individu en fin de productivité ou directement pour sa chaire.

 

La série des "mais qu'est-ce que tu vas manger ?" et "vas brouter ton herbe"

 

Dans ce grand pays qu'est la France, où les restaurants de gastronomie française courent toujours, cette question peut être soit une question pratique, soit une remarque blessante.

 

-la notion de repas : nous avons tous été éduqués à la notion du repas viande : de la viande, et de l'accompagnement avec. Notez le terme "accompagnement" qui délaisse les céréales, légumineuses, et légumes à un simple rôle de figuration, insipide parfois même.

 

-pourtant, tout est question de préparation : tartine de houmous ou de beurre de cacahuète, du chili sin carne, de la paella végé, une bonne poêlée de légumes à l'huile d'olive, une belle courge butternut rôtie... tout est question d'imagination !

 

-mais aussi de diversité : il n'y a pas que de l'herbe, de Provence, mais aussi une infinité de variété de céréales, de légumes secs, de fruits et de légumes, de graines et de noix. On a largement de quoi varier ses repas tout en évitant les carences.

 

La série des carences

 

Dans ce  grand pays, qu'est la France, où les nutritionnistes viandards médiatisés courent toujours, nous avons tous été élevés dans l'idée qu'un repas équilibré s'articulait autour de protéines animales. L'expression "protéines animales" apparaît aux yeux de beaucoup comme un pléonasme. Trois portions de laitage par jour seraient indispensables, comme si le lait était l'unique source de calcium.

 

Pour le fer : le fer se trouve en quantité suffisante dans plusieurs sources végétales, dont les légumineuses (haricots blancs et rouges, pois chiches, lentilles, soja et ses dérivés). Étant moins bien absorbés que le fer issu des cadavres d'animaux, il est conseillé de consommer une source de fer avec un aliment riche en vitamine C, cette vitamine ayant la faculté de favoriser son absorption. Cela donne par exemple du chili sin carne servi avec des tomates, par exemple, ou une orange après un tajine végé. A l'inverse, le thé et le café nuisent l'assimilation de cet oligo-élément. Il faut donc éviter d'en boire dans l'heure qui précède ou suit le repas.

 

Pour la vitamine D : cette vitamine est soit synthétisée par la peau sous l'effet du soleil, soit apportée par l'alimentation "naturelle" (poisson) ou enrichies (lait végétal enrichie). Le visage et les avant-bras exposés au soleil pendant un quart d'heure par jour sous une latitude égale à celle de Perpignan suffit pour avoir sa dose.

 

Pour les protéines : les protéines sont des grosses molécules composées de plus petites appelées acide aminé. Notre corps est capable de synthétiser la plupart de ses acides aminés pour produire ses propres protéines. Toutefois, huit doivent à tout prix être apportés par l'alimentation. On les trouve en quantité suffisante en combinant céréales et légumineuses (pois chiche et blé, maïs et haricot rouge, riz et lentilles, etc). Certaines sources végétales apportent les huit acides aminés en quantité satisfaisante, c'est le cas notamment du soja et du quinoa.

 

Pour la B12 : vitamine nécessaire en très petite quantité, de l'ordre du micro-gramme par jour, mais pourtant indispensable. On la trouve en mangeant tel quel les légumes racines sans les nettoyer au préalables (bon appétit), ou au près d'une source animale de sexe masculin en général très très consentante... ou bien on triche, et on prend un comprimé par semaine.

 

Pour le calcium : il faut savoir que la consommation de lait d'une autre espèce que soi date de 10 000 ans à peine. Alors que notre espèce, l'homo sapiens, est apparu il y a un peu plus de 100 000 ans, et l'humanité plus de 7 millions d'année. Mais comment a-t'il pu survivre sans son précieux calcium ? En fait, le calcium est un minéral abondant. On le trouve en quantité suffisante dans les amandes, les graines de sésames, les haricots blancs, brocoli, chou chinois entre autres. La vache le trouve bien quelque part avant de la restituer dans son lait.

En outre, la santé des os ne se limite au seul apport d'un seul constituant. La solidité de cet organe dépent de tout un ensemble de facteurs. Les occidentaux sont les premiers consommateurs de produits laitiers... et les premiers concernés par l'ostéoporause.

D'autre part, je tiens à faire remarquer que nous sommes la seule espèce de mammifère à consommer du lait à l'âge adulte, et qui plus est, du lait issu d'une autre espèce. A méditer !

 

La série naturaliste

 

Dans ce grand pays qu'est la France, où l'homme de Cro-magnon coure toujours, on défend le caractère naturel, voire animal de l'homme en tant que "prédateur", mais on nie ce caractère naturel/animal et loue son attitude contre-nature pour tout le reste, notamment pour consommer du lait issu d'un autre mammifère.

 

-on fait comme les hommes préhistoriques : mais bien sur, comme lui, on prend sa voiture, on va au supermarché, et on achète un morceau de cadavre élevé en batterie présenté sous vide.

 

-l'homme est omnivore/carnivore : George Cuvier et Darwin, deux grands scientifiques naturalistes reconnus du XIXeme siècle, s'entendaient pour dire que notre alimentation naturelle est d'ordre végétale. Propos repris et confirmés au XXIème par le Dr Milton Mills. Nous sommes en fait des herbivores capables, pour des raisons de survie, de s'adapter à d'autres sources alimentaires que végétales. Mais bonne nouvelle : l'ère glaciaire est passée depuis un petit moment déjà !

 

-on est prédateur, on est au sommet de la chaîne alimentaire : biologiquement, non. Allez, je défie quiconque de partir en forêt, tout nu, et de pister sa proie à l'aide de son odorat digne du chien, sa vue de faucon, attraper avec sa vitesse et son agilité de félin, tuer avec sa force et griffes de l'ours, déchiqueter la chaire crue  avec la force de la mâchoire et les crocs d'un crocodile... malgré notre corps frêle, nos ongles, notre dentition commune aux herbivores, nos sens peu développés.

 

-c'est grâce à la viande que l'homme a pu développer son cerveau : et comment prendre une hypothèse pour une affirmation. Au contraire, en réfléchissant bien, l'homme n'est pas un chasseur naturel. Il a du créer des outils pour chasser. Il a donc du développer son intelligence avant de pouvoir chasser.

 

-il faut manger du muscle pour avoir du muscle : et il suffit de manger ses cheveux pour en avoir de jolis, et des ongles pour une jolie manucure ? Ado, j'ai essayé. Ce régime n'a pas fonctionné.  Il existe des sportifs végétariens, et même des culturistes végétaliens.

Et puis, quel est donc le régime des animaux terrestres les plus puissants ?

 

La série des "ce ne sont que des animaux, les humains d'abord"

 

Dans ce grand pays, qu'est la France, où Dieu le père coure toujours, on aime prétendre la supériorité de l'un, afin de justifier l'exploitation de l'autre.

 

-ça tombe bien, l'homme aussi appartient au règne animal : c'est un primate, un mammifère. Nous sommes  tous dotés de sensibilité, nous pouvons souffrir, mais aussi ressentir de la joie. Des philosophes comme Porphyre ou des biologistes comme Darwin l'ont suffisamment bien démontré.

 

-la faim dans le monde, la pollution, le réchauffement climatique : une part non négligeable des céréales est destinée à l'alimentation du bétail, lui-même destiné à son tour à l'alimentation humaine. Il faut compter entre 7 et 10 kg de céréales pour "produire" 1kg de viande. L'alimentation carnée nourrissant moins de monde, mais nécessitant des productions végétales plus importantes, implique alors comme "solution" non durable les méthodes de cultures productivistes, le recours aux OGM et les déforestations, notamment celle de la forêt d'Amazonie. En outre, l'élevage industriel, de part les rejets de gaz à effets de serre et de lisiers, posent de réels problèmes environnementaux.

 

-la hiérarchie des causes est surtout une bonne justification pour ne rien faire. En effet, il y aura toujours une injustice "plus grande" à combattre, d'autant que les malheurs ne manquent pas. Bien au contraire, se préoccuper d'une cause n'empêche pas de s'intéresser à une autre. Concrètement, on peut boycotter le cuir pour l'exploitation animale et la pollution induites par sa production en amont et en aval, et préférer par exemple un vêtement en coton bio issu du commerce équitable.

 

-le spécisme est une approche consistant à hiérarchiser les espèces. Ainsi, certains mangeurs de boeufs n'hésitent pas à signer des pétitions contre l'hippophagie. Il repose sur la même logique que le sexisme ou le racisme : imposer la supériorité de l'un en se basant sur la différence de l'autre. Et donc, rabaisser l'autre à un rang supposé inférieur autorise moralement son exploitation ou même son extermination. Tout comme le défenseur de la carotte rabaisse l'animal non humain au végétal pour mieux le manger. La palme de l'absurdité revenant sans doute à l'expérimentation animale, l'utilisation d'un animal non humain comme modèle biologique de l'animal humain, y compris en science cognitive, étant à la fois scientifiquement justifiée par la ressemblance et moralement acceptée par la différence.

 

La série "les végétaux souffrent aussi"

 

Dans ce grand pays qu'est la France, où les défenseurs des droits des végétaux courent toujours, cette fantaisie bénéficie d'un certain succès. Réduire l'animal non humain au végétal, en issant le végétal à son niveau, est surtout une bonne excuse pour le manger.

 

-les goûts musicaux des plantes : d'obscures "études" prétendent que les plantes poussent mieux avec de la musique classique que du rock. Bien qu'aucune de ses études ne soit validée scientifiquement, le fait que les plantes, prises dans leur globalité malgré l'importante diversité, soient sensibles aux mêmes ondes sonores que nous, et partagent le même goût que l'élite intellectuelle occidentale est, comment dire... surprenante ?

 

-le cri de la carottes : je me souviens d'une discussion houleuse à ce sujet. La personne en face de moi soutenait que les plantes pouvaient souffrir, et ce en dépit de notions biologiques élémentaires, telle que l'existence d'un système nerveux, qu'il soit complexe ou rudimentaire, absent chez les végétaux. Mais le but de la manoeuvre était tout autre. La personne en question a fini par lâcher : "tu ne peux pas être végétalienne pour la souffrance animale".

Croire la souffrance animale ou supposée "végétale" comme étant inévitable, permet de déculpabiliser son régime carnivore/omnivore. L'attrait pour la viande est ainsi autorisé.

 

La série des "j'aime trop la viande" et "je ne pourrais pas m'en passer"

 

Dans ce grand pays, qu'est la France, où les estomacs sur pattes courent toujours, certaines personnes n'hésitent pas à mettre leur plaisir gustatif avant le bien-être animal.

Toutefois, le simple plaisir éprouvé peut-il tout justifier ? Bien sur que non. L'héroïne procure sans doute beaucoup de plaisir, est-ce une raison pour en consommer ? A l'instar des drogues opiacées, sommes nous vraiment dépendants à la chaire animale ?

Jérémy Bentham, philosophe anglais du XIXeme siècle, et bien d'autres, désapprouvaient le sacrifice d'êtres sensibles pour notre amusement ou gloutonnerie.

Ça me rappelle une anecdote. A table, une personne à côté de moi, me présente à une autre en disant : "et pourtant, avant, elle aimait la viande." Comme on dit : "il n'y a que les idiots qui ne changent pas d'avis."

 

 

Conclusions :

 

Il n'y a pas de questions idiotes, si leur but est de comprendre, mais il y a des remarques stupides, quand leur objectif est de dénigrer.

Le végétarisme/végétalisme/véganisme n'est pas seulement un régime alimentaire, c'est aussi tout un mode de vie et surtout une philosophie appliquée au quotidien.

Le but de cet article est de recenser les questions fréquentes et d'y répondre une bonne fois pour toute. J'espère en avoir oublié aucune. Toutefois, certains points méritent sans doute quelques approfondissements. Je vous invite donc à consulter ces différents liens.

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :